Ce dernier jour libre avant de revenir à Beijing pour prendre le transmongolien a été consacré à saluer le Fleuve Jaune. On a dû quand même faire plus de 100 km, mais c’était à l’opposé d’hier. Cela nous a permis de découvrir un autre paysage des Ordos, plus aride et raviné, mais avec le même mouvement collectif de reboisement, avec l’aménagement en terrasses impressionnantes.
Le Fleuve Jaune est le deuxième de Chine en longueur: près de 5500 km. Mais le premier en impacts socio-historiques. Avec les énormes charges de limon qu’il charrie, il nourrit depuis des millénaires des communautés importantes, tout en détruisant parfois des villages par ses crues débordantes. On le nomme la mère de la Chine. Mère menacée par une exploitation agricole et industrielle sauvage. Actuellement, c’est un des fleuves chinois et mondiaux les plus pollués.
On est quand même venu le saluer sur ses berges industrielles encombrées, après l’avoir admiré de haut. Il nous a sussuré des parole du Tao:
« Tous les fleuves se jettent à la mer, parce qu’elle est plus basse qu’ils ne sont. L’humilité lui confère sa puissance » (Tao Te King, p.66)
« Dans la cosmologie chinoise, l’eau symbolise l’élément le plus humble, le plus insignifiant en apparence qui, bien que ne résistant à rien, vient pourtant à bout des matières les plus solides » ( A. Cheng, Histoire de la pensée chinoise, p.192).
Dans cette histoire, Anne Cheng montre très précisément comment sa symbolique ambivalente de naissance et de mort a nourri la culture chinoise. C’est sans doute le moment de rappeler que la cosmologie chinoise, à la différence de la nôtre, comporte cinq éléments, dont 3 semblables, la terre, le feu et l’eau, et deux différents, le bois et le fer.
Ce salut au Fleuve Jaune et cette remontée de la symbolique de l’eau ont ré-suscité la présence d’un grand collègue récemment disparu: René Barbier. L’eau était son élément le plus personnel. Dans la dynamique du Groupe de Recherche sur l’Écoformation (Gref), il a coordonné l’ouvrage sur Les eaux écoformatrices (2002).
En plus, c’était un tel amoureux de la Chine que celle-ci s’est personnifiée avec sa dernière compagne. Je me permets de la saluer du Fleuve Jaune, en espérant la connaître un jour.
Salut René et que ton esprit se déploie aussi puissamment et humblement que l’eau.
Ton hommage à René est très touchant Gaston. Tu nous le rend présent partout en nous et autour de nous comme l'eau son élément préféré.
RépondreSupprimerJeanne-Marie